Les violences faites aux femmes et aux filles constituent l’une des violations des droits de l’homme les plus répandues en Guinée. Les violences sexuelles occupent la première place avec 29,3% de cas recensés en 2022. Cette année l’Office de Protection du Genre de l’Enfant et des Mœurs (OPROGEM) a enregistré au cours des 3 premiers trimestres 177 cas de viols dont plus de la moitié constitue des filles de moins de 18 ans. Selon l’Enquête Nationale sur les Violence Basée sur le Genre, 80,7% des femmes et filles de 15 à 69 ans ont subi un acte de violence depuis l’âge de 15 ans.
Le viol, le mariage précoce, le mariage forcé, l’excision et le harcèlement sont entre autres violences basées sur le genre les plus rependues en Guinée. Selon l’enquête démographique de la santé plus de 654 milles filles sont mariées chaque année avant l’âge de 18 ans. La prévalence de l’excision passe de 97 % à 5 % chez les femmes de 15 – 49 ans et de 45 % à 39 % chez les filles de moins de 15 ans. Près du tiers des filles de 0- à 14 ans sont excisées par des professionnelles de santé, notamment les Infirmiers et les Sage-femme. Au total 390 milles 376 filles de moins de 15 ans sont encore victimes des MGF chaque année.
Ces dernières années les violences sexuelles sont l’une des VBG qui persistent en République de Guinée d’après les derniers rapports de l’Office de protection du Genre, de l’Enfance et des Mœurs OPROGEM. Aucune tranche d’âge n’est épargnée même si le phénomène est plus remarqué chez les jeunes filles et les mineures de 0 à 15 ans. L’OPROGEM affirme avoir recensé 178 cas de viols au cours des trois premiers trimestres de 2023 contre 266 cas enregistrés en 2022. Le dernier cas publié dans les médias et qui déchire les cœurs est celle de la petite fille de 9 ans violée torturée et assassinée par son bourreau dans son école en novembre dernier à Dubreka.
Selon le Pr Hassane Bah médecin légiste et chef service médico légale de l’hôpital Ignace Deen, les agressions sexuelles représentent 30% des consultations médico-légales. Il soutient que c’est un chiffre très élevé par rapport à la violence physique, conjugale, intrafamiliale qui sont aussi toutes des violences basées sur le genre. « Mais si je dois parler en termes de fréquence, même de gravité des lésions, je dirai que les agressions sexuelles occupent la première place » a-t-il indiqué. Il assure que 70% des filles victimes d’agressions sexuelles reçues pour une prise en charge sont âgées de moins de 12 ans et n’ont pas un développement complet des organes sexuels secondaires. Ce qui entraîne des lésions importantes qui nécessitent une intervention légale. « Lorsque les enfants viennent, nous les examinons, constatons les lésions qui sont en rapport avec le viol et regardons s’il y a des lésions en rapport avec une pénétration sexuelle, des lésions de défense qui prouvent le non consentement de la victime. Ce sont tous ces éléments que nous consignons dans un rapport que nous remettons à l’officier de police judiciaire et quelquefois au parquet. Il peut arriver qu’une fille victime d’agressions sexuelles présente des lésions physiques, des blessures, des déchirures qui nécessitent une intervention chirurgicale, une prise en charge médicale. A ce niveau, il y a un problème parce qu’il n’y a pas de moyens, c’est-à-dire c’est souvent des enfants, des parents qui sont démunis. Il n’y a pas une structure appropriée aujourd’hui qui puisse leurs prendre en charge. Donc, les enfants victimes font recours à la famille ou aux proches » précise Professeur Hassan sur generationquiose.org.
Le club des jeunes filles leaders de Guinée et plusieurs autres ONG et associations féminines militent pour l’élimination des VBG en Guinée. Les 16 jours d’activisme ont été lancé le 25 Novembre 2023 dans ce sens, et c’est à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Cette campagne prend fin le 10 décembre, une date qui marque également la journée Mondiale des droits humains.
Les ONG et associations des droits des femmes exigent justice et sécurité pour les victimes de viol, elles sollicitent une bonne prise en charge des victimes du moment de la dénonciation jusqu’à la poursuite judiciaire et pénale des auteurs du crime. Elles demandent aussi la révision des textes de loi sur la définition la qualification et la criminalisation des cas d’harcèlement et d’agression sexuelle pendant les rassemblements ou en public.
Ensuite, l’adoption d’une loi spéciale sur les agressions sexuelles et le viol, la mise en place d’une police et d’un tribunal spécialisé en mode d’agression sexuelle et l’augmentation des services d’assistances juridique et médico légales pour un suivi sérieux des cas de viol à travers tout le territoire.
Nantady CAMARA