Le président de la transition Colonel Mamady Doumbouya , vient de publier l’ossature de son gouvernent. Au total 25 postes ministériels et deux secrétariats généraux. Si certains départements ont été combinés pour en faire un, par contre le ministère de l’Assainissement a été complètement supprimé. Car rien n’indique dans cet organigramme le département qui va désormais s’occuper de ce secteur. Ce qui ne laisse pas indifferent les responsables du secteur de l’assainissement.
Mr Sory CAMARA, vous êtes Président de la Fédération des Gestionnaires des Déchets de Guinée (FEGEDEG) et Promoteur du Centre de Recherches Environnementales et de Valorisation des déchets (CREVADE) quel est l’état actuel du secteur d’assainissement?
Le secteur d’assainissement se trouve dans une situation assez compliquée, floue et beaucoup de contraintes d’ordre technique, politique, financière et socio environnementale, le tout caractérisé par l’incivisme de la population, le problème foncier pour les infrastructures d’assainissement, surtout le manque d’engagement des autorités pour assurer la pérennisation des projets et programmes du secteur d’assainissement.
Malgré les efforts des acteurs de ce secteurs, la volonté et la vision du gouvernement; les objectifs fixés dans le Plan National du Développement Economique et Social (PNDES), notamment dans son quatrième pilier reste loin d’être atteint.
Qu’est ce qui explique cela ?
D’abord il y a plusieurs types de déchets sur lesquels aucune stratégie ni politique n’est définie pour les gérer. Aujourd’hui, la gestion des déchets est confrontée aux contraintes politiques, l’absence d’un code de l’assainissement, d’une politique nationale de prévention et gestion des différents types de déchets, des questions de transabilité, de rédevabilité, de la transparence et de la gouvernance des déchets sont autant de faiblesses que connait aujourd’hui le secteur d’assainissement.
malgré les efforts du gouvernement qui s’est traduit par la création d’une agence nationale de l’assainissement et de salubrité publique ( ANASP) ; de la création d’un Ministère en charge de l’assainissement ( Ministère de l’hydraulique et de l’assainissement), le transfert de la compétence de l’assainissement au niveau des communes à travers le nouveau code des collectivités ; des appuis institutionnels à travers les Projets Sanita ville Propre et Sanita Ville Durable sous financement du 11ème FED, malgré la motivation et l’engagement des acteurs du secteur privé et des organisations de la société civile.
Avec plus de 2000 tonnes de déchets ménagers et des milliers de déchets biomédicaux, industriels, des déchets de BTP, des déchets marins dans le grand Conakry, sachant que le taux moyen de transfert des déchets à la décharge est de 1200 tonnes de déchets ménagers par jour.
Il reste encore assez de reformes et d’engagement politiques dans le secteur d’assainissement. Car aujourd’hui, l’intérieur du pays ne connait aucun programme d’assainissement, l’Etat est redevable financièrement à des PME dans le secteur d’assainissement, les factures que le gouvernement doit payer aux PME dans le cadre du balayage et entretient des réseaux s’élèvent à plusieurs milliards de francs guinéens…
Quelle politique faut-il mener pour aider plus ce secteur?
Il faut d’abord élaborer un code de l’assainissement ; élaborer des stratégies de prévention et gestion des déchets ; de créer des filières d’assainissement, subventionner la pré-collecte des déchets ménagers par des PME, promouvoir l’entrepreneuriat vert, développer des activités génératrices vertes, de promouvoir et soutenir les entreprises locales, donner des marchés et financer les projets prenant en compte les produits écologiques. Il faut travailler en synergie, de manière participative et inclusive avec l’ensemble de tous les acteurs afin de mettre en place un système dynamique ; intégrée et durable.
Quelle devrait être l’approche des nouvelles autorités pour rendre plus enviable le secteur d’assainissement ?
C’est très simple car tout a été définie, proposée et archivée, il faut impliquer les acteurs potentiels opérationnels, financer les projets et soutenir les initiatives locales de collecte, transfert, tri et de traitement des déchets, de valorisation et autres formes de gestion des déchets.
Aujourd’hui, il faut valoriser, outiller, renforcer les capacités des faitières et Fédérations et les autres instituions déjà crées, telle que l’Agence Nationale de l’Assainissement et de Salubrité Publiques (ANASP), le centre de recherches environnementales et de valorisation des déchets (CREVADE) ; l’Observatoire National de l’Assainissement et de Gestion des Déchets (ONAGED) etc.…
Il faut informer, sensibiliser, éduquer et impliquer la population, afin de promouvoir l’éduction environnementale en milieu scolaire et dans les autres lieux publics.
Il faut également promouvoir la gestion des déchets dans les villes secondaires, le transfert de technologie dans le secteur d’assainissement, inciter à investir dans le secteur d’assainissement ; créer un fonds d’assainissement.
Avec la surpression du Ministère de l’Hydraulique et l’Assainissement (MHA), est ce que vous ne craignez pas que cela puisse avoir des impacts négatifs sur le secteur de l’assainissement ?
Nous craignons beaucoup aujourd’hui, car la création d’un Ministère en charge de l’Assainissement, créée en 2019, a été l’aboutissement de plusieurs réflexions et recommandations de tous les acteurs, notamment les PME, le secteur privé, public, les institutions, les organisations de la société civile et la population.
La création d’un Ministère en charge de l’assainissement est une nécessité dans tous les pays qui aspirent gérer durablement leurs déchets. Pour le cas de la Guinée, le secteur d’assainissement a connu assez de problèmes au cours de sa mutation, cela dans des contextes de vide juridique, de conflit de pouvoir et de compétence etc.…
Les déchets sont produits dans plusieurs secteurs d’activités, la gestion de ces déchets varie en fonction des exigences de ce secteur, c’est pourquoi le Ministère en charge de l’assainissement doit avoir plusieurs directions et des services différents.
En Guinée, la gestion des déchets solides et assimilés est une des compétences révolues aux communes, sous tutelle du Ministère de l’Administration et de la Décentralisation du Territoire (MATD).
Normalement la gestion des déchets ménagers doit relever de la compétence du MATD et les déchets industriels, dangereux et inertes devraient relever du Ministère en charge de l’environnement.
Que Compte faire la FEGEDEG pour que le secteur d’assainissement soit inscrit parmi les priorités ?
Nous avons déjà commencé des consultations, nous avons fait des propositions que nous soumettrons aux autorités ; nous travaillons techniquement sur une approche avec laquelle nous accompagnerons les nouvelles autorités dans la prévention, gestion des déchets et l’amélioration du cadre de vie des populations.
La question de déchet est transversale, elle touche la santé publique, les catastrophes, le changement climatique, l’autonomisation des femmes et jeunes et le développement de notre pays.
c’est pourquoi nous sommes disposés à mettre notre expertises et nos moyens afin d’améliorer la gestion des déchets, cela à travers notre implication effective dans la formulation des programmes et la prise des décisions, la mise en œuvre des programmes, la mobilisation de nos partenaires et des ressources pour financer les projets d’assainissement. Informer, sensibiliser et appuyer les différents acteurs impliqués dans la gestion des déchets.
Propos recueillis par Aliou Diallo